Crítica DE ESPECTÁCULO: FurbytaLE EN TÚNEZ.

CRÍTICA DE ESPECTÁCULO

Crítica sobre Furbytale. Una historia sobre el veraneo eterno por Haykel Mani durante el Festival Internacional de Teatro de Monastir (Túnez) en agosto de 2019. 

Furbytale : La tragédie de l’Homme agonisant sous le poids du marché écrasant.  

Aujourd’hui, le 18/08/2019  à 21 :30 au centre culturel universitaire de Monastir, dans le cadre du festival international du théâtre universitaire de Monastir, j ai vu Furbytale, une pièce de théâtre d’une troupe espagnole qui a duré environ 1h. 

Plusieurs raisons me poussent à écrire cet article : le plaisir que j’ai éprouvé en regardant ce spectacle, l’état de trouble qu’il a provoqué chez le public, mais aussi (et surtout) la bonne maîtrise des arts de la mise en scène et du jeu d’acteur qui a ancré la pièce dans le langage théâtral pur et dur.

A vous dire vrai, je ne suis pas très bien connaisseur en langue anglaise. Eh oui ! les deux actrices (seules sur scène) parlent du début jusqu’à la fin en anglais. Mais,  heureusement, le spectateur a des yeux, une tête et un cœur. Trois éléments sur lesquels le langage théâtral se construit inévitablement lors de  l’échange scène-salle, acteur-spectateur. Et justement la pièce Furbytale est une de ces pièces qui ne manquent pas d’impliquer, pour la réception des différentes articulations du jeu scénique, les trois générateurs de signes et du sens dans la pratique du langage scénique : le visuel, le rationnel et l’émotionnel. 

En revanche, c’est effectivement, pour ces mêmes techniques de la création théâtrale moderne que, souvent, un trouble général et un malaise peuvent déstabiliser et déséquilibrer le repos (sommeil ?) d’un spectateur consommateur tranquille du spectacle. En effet, ce genre de spectacle qui se libère de la dominance bourgeoise et narcissique d’un texte dominant (qui écrase tous les autres éléments fondamentaux constructif de l’œuvre théâtrale) et d’un comédien enfermé dans l’espace d’une bouche qui (à peine) dit un texte, nécessite obligatoirement un spectateur averti, un spectateur éveillé, un spectateur conscient des différentes composantes de la création théâtrale : à savoir : le jeu d’acteur, le texte, le décor, la scénographie, l’objet et accessoires, la musique ; la vidéo, les costumes, les masques, (la marionnette ou mannequin parfois), les lumières, les effets sonores, etc. Bien évidemment rares sont les spectacles qui excellent et maitrisent chaque fonctionnement de chacun de ses éléments théâtraux. Mais ce qui compte c’est l’harmonie et la symbiose qui dominent les rapports entre eux tous sans tomber dans la monotonie ou le blocage du jeu scénique fastidieux. 

De plus, le rôle du spectateur face à ce genre de spectacle moderne ce n’est pas d’être un consommateur de spectacle mais un producteur de sens, un acteur impliqué dans le jeu et dans la construction du puzzle dramatique (et dramaturgique ?) qui incombe à tous les artistes de l’œuvre : comédien, metteur en scène, scénographe, auteur, régisseur lumière, vidéaste, etc. En effet, le spectateur par son rôle inévitable et par son effort intellectuel et corporel dans la salle brise la frontière classique qui le sépare de la scène et se métamorphose (consciemment ou inconsciemment), du bon gré ou du mauvais gré, en un Spect-Acteur qui contrôle ou qui réorganise cet échange profond entre acteurs et spectateurs. Je me rappelle, dans ce sens, d’une idée importante d’Anne Ubersfeld qui dit : 

Le spectateur, physiquement intégré à l’espace, parfois agressé par lui, est obligé non de le recevoir, mais de le déchiffrer, et, à la limite de le reconstruire. Au sens premier du mot, l’espace théâtral est distance, fossé entre les signes et lui.  (1).

Furbytale, s’inscrit, bel et bien, dans ce genre de spectacle qui repose sur la réorganisation des différents signes scéniques. Cette réorganisation des signes théâtraux est une tache offerte au spectateur, « comme un cadeau que l’on reçoit emballé et dont on prend son temps à tirer la ficelle », comme une énigme à déchiffrer, comme un poème dont les vers et les images sont à réorganiser. 

Malheureusement, à la fin du spectacle j’ai eu de mauvais retours sur la pièce. Ces retours sont du genre : « on n’a pas compris », « ce n’est pas du théâtre », « où est la fable, c’est quoi l’histoire », « c’est en anglais et je ne comprends pas l’anglais », etc. D’autres disent « on a vu quand même, quelques belles images » « j ai bien aimé, mais c’est juste un Show » « Non c’est de l’animation », etc.

Personnellement, j ai été fasciné et très bien impressionné par la qualité du jeu des actrices, mais surtout par les magnifiques solutions de mise en scène pour raconter la belle histoire de ces deux personnages. Mais face à ces quelques avis exprimés par mes amis, ne dois-je pas me réviser ? Ne suis-je pas perdu dans les nuages scrupuleux de mes fantasmes ? Ne tirai-je pas plaisir, simplement, de la complexité indéchiffrable d’un jeu exalté et d’une mise en scène exacerbée ? Il faut que je me repose et laisser calmer mon enthousiasme. Demain, en réfléchissant mieux, en revoyant le spectacle plusieurs fois dans l’écran de ma mémoire,  je serai plus objectif, plus concret et mon article sera, peut-être plus lucide. 

Le lendemain : le 19/08/2019. 

FURBYTALE. A STORY ABOUT ENDLESS SUMMER. MONASTIR, TÚNEZ. AGOSTO 2019.

Furbytale : Titre et fable. 

Furbytale est le titre en anglais de cette pièce.

Tale veut dire en français : « conte », « histoire », « récit ». Mais aussi « rapport », « lien ».

Furby c’est une sorte de jouets qui ressemblent à des peluches. Les furbys sont des peluches en formes de chats qui miaules et qui bougent sous l’effet d’un petit mécanisme à l’intérieur de ce bout de tissus qui forme leur corps. Donc Furbytale veut dire le conte des furbys ou l’histoire de ces peluches. 

C’est quoi le conte de ces « furbys » ? C’est la fable de la pièce, elle-même. 

 

La fable : Dans l’espace d’un nuage, peut-être même l’espace d’une chambre, peut être même l’espace d’une maison, vivent deux filles : A et B. (deux sœurs ? deux amies ? qu’importe. La fille A prend le pouvoir sur la fille B, d’abord par la taille (B est légèrement plus grande et moins jeune que A.) Mais aussi, par la prise de parole sur scène et sa capacité à se métamorphoser en d’autres êtres et d’autres personnages : déesse, chanteuse, danseuse, etc. La fille A a tellement souffert des hommes qu’elle ne peut plus les rencontrer ou vivre avec eux davantage. Elle est dégoutée des hommes qui lui font briser le cœur à force de trahir, mentir et ne rien sentir. Alors, elle ne veut plus sortir de sa bulle ; jusqu’à un jour où une entreprise de fabrication de jouets pour enfants a inventé « les furbys ». La fille A était tellement impressionnée par la beauté de ces jouets, leur gentillesse et leur mutisme qu’elle a finit par les aimer et les substituer aux hommes cruels et impitoyables. Elle a même osé  tomber amoureuse de l’un de ces furbys. Elle sort fêter ses belles soirées avec lui. Elle l’embrasse. Fait l’amour avec (même si ce n’est pas dit ni joué carrément, mais on peut le comprendre). Désespérée d’elle, la Fille B a essayé de la réveiller et de l’arracher de ses fantasmes fantasmagoriques, en vain. Jusqu’au moment où la fille B demande à la fille A si elle veut être métamorphosée en furbys et ne plus être femme. Cette dernière accepte. La fille B se transforme en Déesse et fait d’elle une « furby ». Fin du conte. Fin de la fable. 

 

Le jeu d’acteur. Un comédien animé par extension à d’objets inanimés

Les deux actrices, très jeunes, jouaient comme deux petites filles dans une chambre pour enfants. Loin de toute exaltation du pathos, elles se mettaient à faire des actions visibles, en silence. Elles nous montraient l’espace du jeu d’abord, elles allumaient des bougies (d’anniversaire peut-être ou de fin d’année), parfois quand il faut parler elles ne disaient que des mots universellement connus et compris comme : papa, maman, blablabla blablabla, hello, hello. Elles nous montraient la joie qu’elles partageaient avec les furbys, ces êtres objets qui sont devenus les vrais maîtres de l’espace et leur raison d’être. La fille B prenait un microphone et se mettait à chanter une chanson d’amour où le furby devient le prince charmant qui ne brise pas le cœur de son amante préférée. Et tout d’un coup, la fille B devient une animatrice dans la salle, elle tend le micro à des spectateurs pour leur demander leurs avis sur la décision de la fille A, savoir s’ils sont ‘accord avec elle, s’ils sont contre son choix etc. La fille A répond  aux questions des spectateurs qui pouvaient parler en anglais et discute avec eux. Par surprise, la fille B a révélé un secret aux spectateurs : elle projetait en plein écran une photo où la fille A, dans un des bars de la ville se mettait à embrasser son chevalier furby en bouche-à-bouche érotique. La fille A se mettait en colère et se disait avoir raison de ne pas faire confiance aux hommes, parce qu’ils finissent toujours par dévoiler un secret. 

Sans tomber dans le débordement sentimental, ni dans les cris agressifs et pathétiques, ni dans les gestes violents d’un comédien qui pleure en disant une longue tirade tragique, les deux comédiennes savaient très bien retenir leurs sentiments et contrôler leurs gestes et mouvements. Elles ne sont que des « montreuses » du jeu, des « faiseuses » d’actions. L’essentiel pour elles c’était d’abord le spectateur qui ne comprend ni l’espagnole, ni l’anglais : Comment l’impliquer dans l’action ? Comment lui raconter l’histoire ? Comment ne pas tomber dans la monotonie même pas pour une seconde ? Comment briser l’handicap de la langue ? 

Et justement le public, pour la première fois je l’ai vu chanter, danser, rire, parler et discuter avec les comédiennes. Grace à cette distanciation brechtienne au niveau du jeu de l acteur, les comédiennes ont échappé à l’identification avec leurs personnages. L’imitation des êtres dans la nature, tels qu’ils sont réellement et naturellement dans la société aurait pu menacer la justesse de leurs mouvements sur scène, ou aurait pu les piéger dans l’incompréhension totale vis-à-vis du public, ou aurait pu piéger le jeu dans la surexcitation psychologique et l’exagération pathétique. Rappelons-nous ces quelques mots de B.Brecht dans ses Ecrits sur le théâtre. Il dit dans Extrait d’une lettre à un comédien : 

N’oublions pas en effet, les conséquences de l’attitude du comédien qui s’identifie totalement avec son personnage : il arrive à le faire paraitre tellement normal, tellement inconcevable sous un autre aspect, qu’il ne reste plus au spectateur qu’à le prendre comme il se présente , le résultat c’est la naissance d’une mentalité toute stérile (comprendre c’est excuser) semblable à celle que nous avons connue, sous une forme particulièrement achevée avec le naturalisme (…) Jamais la raison ne se jette froidement dans la lutte ; elle vient simplement de ce que les pièces ne sont plus livrées à leurs surexcitation d’un « tempérament dramatique ». C’est le sujet qui excite l’art véritable. Lorsque de temps à autre le spectateur croit déceler de la froideur, c’est simplement qu’il est sensible à la manière souveraine avec laquelle ce jeu est conduit, et hors de laquelle il n’est point d’art.  (2).

A ceux qui disent que c’est du Show, puisque la comédienne a joué la chanteuse danseuse et qu’elle ne s’est pas identifiée intégralement avec son personnage principal, je répondrai que la comédienne a aussi joué le rôle d’un prêtre ou du pape quand elle a fait de son drap blanc la chape d’un homme d’église lors de la métamorphose finale de la fille A en un furby. Est-ce qu’on peut dire que la pièce est une cérémonie religieuse ? Ou que c’est de la liturgie ? Non. Mais l’aspect du Show vient dans le cadre de la fiction et non du genre de la représentation. La comédienne en ce moment joue le personnage d’une femme du Show pour quelque moment. Elle n’est pas le personnage du Show. Malheureusement, ce genre d’acteur qui mise sur le jeu théâtral pur devient de plus en plus rare. Je dis « malheureusement » parce que ce jeu est nait de l’action purement visuelle, auditive, tactile, objective et objectale. Sans recours à la langue que je ne comprends pas et qui soit couverte d’une « overdose » de sentiments que je ne sens pas. Pourtant ce genre d’acteur à la brechtienne n’est plus moderne ou en vogue, tout le monde en parle, bon sang ! Aujourd’hui on en parle comme une pratique du déjà vu, c’est vrai ! Mais c’est aussi une pratique scénique la plus « populaire », la plus communément et absolument partagée entre les hommes (spectateurs), c’est-à-dire tout simplement la plus universelle et la plus démocratique. Elle n’oblige pas le spectateur d’être un grand connaisseur de la langue parlée. Celle-ci n’est qu’un « accessoire » parmi d’autres plus importants et plus théâtraux sur scène. C’est pourquoi je plaisante en disant, modestement : « Dieu merci ! J’ai des yeux, une tête et un cœur ». Tout le monde en a mon ami ! Je ne suis pas vaniteux.    

 

FURBYTALE. A STORY ABOUT ENDLESS SUMMER. MONASTIR, TÚNEZ. AGOSTO 2019.

 

La mise en scène de Furbytale : Oscillation entre silence et parole « faite »action

Je me rappelle que le jeu de la pièce commence par une action simple, qu’on a crue un moment qu’elle est « futile » ou peut être sans importance. La fille A entre en scène le gâteau de la fête à la main (anniversaire ou fête d’une nouvelle année ? qu’importe.). Elle essaye de mettre une date comme on fait dans chacune de nos fêtes (celle de la nouvelle année ou de son âge ? Qu’importe). Les bougies qu’on veut mettre sur le gâteau ont la forme de 4 chiffres (1, 1,9 et 9). L’essentiel pour nous, spectateurs, c’est que cette fille ne pouvait pas fixer les 4 bougies (chiffres) sur le gâteau. Alors, elle se met à jouer avec l’ordre, tantôt elle fixe le nombre 1991, tantôt 1919, tantôt, 1199 ; tantôt 9191 et enfin 9911. Par conséquent, le spectateur se perd et ne connait pas la date de l’histoire à raconter : on ne sait pas si cette histoire ou ce conte à raconter date en l’an 1991 ou en 9911 ou 9191, etc. Là, dans le langage théâtral on peut dire que le temps de l’action est indéterminé, que les personnages sont venus d’un autre temps, que l’action est celle d’un conte qui traduit ou qui décrit, peut-être, les conditions de vie de l’homme dans un temps quelconque de l’histoire (la nôtre ?). 

Ensuite, tout de suite après le jeu de chiffres vient le jeu des objets. En effet, on voit que la scène est envahie par les peluches furby. A l’écran de la projection vidéo ; on nous explique qu’une entreprise de fabrication de jouets pour enfants (dont j’ai oublié le nom) à inventé ces « furbys ». 

 Les deux filles parlent avec ces furby, jouent avec, les embrassent et font d’eux le centre d’inertie autour duquel tourne toute l’action, d’où l’importance du titre. Au milieu de tous les mouvements, de tous les fous rire, les danses et les chants de fête de ces deux filles on entend des mots en anglais, des bribes de mots (comme : pain, suffring, break the heart, blad et blood, sad et sadnesse, lonly et alone, etc.). On peut se demander, par curiosité passagère si l’on veut dire, où sont les père et mère des ces deux filles ? Absents, totalement absents tous deux, du début de la pièce jusqu’à la fin.

Personnellement, quand je vois qu’une entreprise de fabrication de jouets a impliqué et pénétré tout ce nombre de jouets en plastique sur scène, et que toute la jeunesse (qu’on voit par projection vidéo) est entassée par masse dans les bars, les discothèques entrain de boire de l’alcool et consommer de la drogue, je dois comprendre que le père et la mère sont absents parce qu’ils sont une main d’œuvre absorbée et engloutie sous le poids de la consommation sauvage. Le père et la mère sont dans l’usine. Ils n’ont pas le temps pour jouer avec ces enfants. Ils constituent l’exemple de l’être humain écrasé sous le poids du marché. Par conséquent le « furby » est le signe de cet écrasement de l’humain en silence. Le furby est le signe « indexe » de l’objet substitué à l’homme anéantie par le capitalisme privé, monstrueux et inhumain. C’est pourquoi, La fille A qui ne veut plus voir ou sortir avec des hommes, par déception, par vengeance, par pessimisme a choisi d’abandonner son visage d’humain et de porter un masque. Parce que le masque est un genre d’association à la vérité tragique de l’humain qui perd son humanité au profit de l’objet qui le remplace irrémédiablement. L’homme, envahi par ce tas incroyable d’objets (surtout en plastique) perd la vérité et s’écroule dans le mensonge. C’est pourquoi, de temps à autre, la fille B, quand la fille A se met à dormir debout comme un furby ou comme un animal, elle profite d’un long silence (10 seconde à peu près). Elle enlève en ralenti son masque qui la dissocie de l’homme, pour nous fixer du regard, nous les spectateurs qui regardent ce regard. Elle nous fixe d’un regard accusateur, un regard triste qui tue. Puis, silencieusement elle gagne les coulisses. 

Devant toutes ces images, ces objets, ces mouvements, ces masques et ces corps le langage de la mise en scène est fait dans un ordre bien établi pour raconter l’histoire. C’est cet art de mise en scène qui nous permet cette lecture modeste personnelle que je viens de partager avec les autres spectateurs. C’est en ce moment précis où l’on peut parler de théâtre, je pense. Quand c’est l’objet d’une vision à discuter, d’une action à commenter, d’un accessoire à porter, d’un mouvement à étudier, d’un masque à porter qu’il s’agit et que ca devient intéressant et non pas quand c’est l’objet d’un texte à dire, d’une langue à transmettre, d’une histoire à raconter sous la dictature d’une langue que je ne comprends pas.

Bref, les espagnols savent que nous ne comprenons pas l’espagnole c’est pourquoi ils ont bien appris le langage de la scène, ils ont bien compris que le théâtre est universel ou il n’est pas. Alors ils ont misé sur la démocratie du langage théâtral universel. Par conséquent ; ils ont réussi à nous exprimer leur prise de position politique et leurs choix esthétique d’un théâtre pour tous, (« élitiste pour tous ? » peut-être.) contre ce tsunami d’inhumanité ensauvagée qui fait de l’homme un loup pour l’homme, qui fait du marché et du capitaliste les nouveaux colonisateurs du monde, et qui fait de l’objet en plastique (furby, ordinateur, vibreur, téléphone portable, argent blanchi, tablette, ou télévision de la bêtise qui tue) la représentation nouvelle de l’amour, de la fraternité, de la familiarité, de la paternité, de la maternité, de l’amitié et de l’art. Est-ce une question d’image, tout simplement ? Attention, ne tombons pas dans le piège des images. Le théâtre n’est pas l’art des belles images, tout simplement ; sinon qu’est ce que l’art plastique et qu’est ce que le cinéma ? L’image au théâtre n’a de valeur, n’a de sens que dans son rapport avec les autres images, avec l’accessoire qui fait de l’image une image, avec le mouvement de l’acteur, avec le texte, avec le décor et avec la scénographie tout entière. C’est ce rapport, ce lien, ce «tale » qui fait de l’image une image de théâtre. Pour finir, permettez-moi de conduire ces quelques mots de Bernard Dort dans son ouvrage La représentation émancipée. Il dit  :

« Alors, le spectateur pourrait choisir, combler les trous ou gommer les trop pleines d’une telle polyphonie qui ne connaitrait plus de dominante. C’est lui qui serait la clef de voûte de la représentation. Car Brecht a voulu fonder celle-ci non sur elle-même mais sur ce qui lui est extérieur : la place et la réflexion du spectateur. Evoquant aujourd’hui son travail avec Robert Wilson, Heiner Muller, ne dit pas autre chose : « Le plus important est que Bob Wilson soit contre l’interprétation. Tous les éléments de son théâtre sont égaux. Le texte, la lumière, la chorégraphie, tout est de la même importance. »  (3)

Haykel Mani- heykel.mani@yahoo.fr. (00216) 53094506.

(1) Anne Ubersfeld, Lire le théâtre II, L’école du spectateur, Belin, 1996. p.105.
(2) Bertolt Brecht, Ecrits sur le théâtre, L’Arche, 1963, p.250.251.
 (3) Bernard Dort, La représentation émancipée, Le temps du théâtre, 1988, p.181.182.